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Le « juju » plus efficace que les coups

(mars 2008)

Article publié dans le mensuel d'Amnesty-Belgique francophone, Libertés!, de mars 2008, aussi disponible sur le site www.libertes.be 

                     Le « juju » plus efficace que les coups

Les Africaines prostituées en Belgique sont souvent prisonnières d’un rituel vaudou qui les incite à ne pas se rebeller contre leur « mère maquerelle ». A terme, elles peuvent racheter leur liberté.  

 

L’exploitation des prostituées africaines fonctionne selon des règles différentes de celles des Européennes. En Belgique, une majorité sont issues du Nigeria, et plus particulièrement de la région de « Benin City », où elles sont généralement déjà prostituées. Pour elles, pas de répartition « 50-50 » des gains comme chez les Bulgares, pas de retour régulier au pays d’origine, mais un espoir d’être un jour libre de tout proxénète. La plupart d’entre elles sont sous la coupe d’une « madame », elle-même ancienne prostituée, qui les a recrutées dans leur pays d’origine et leur propose le voyage vers l’Europe en échange de l’engagement à rembourser une dette au montant très variable, mais qui semble osciller entre 15.000 et 50.000 euros. L’accord est scellé par une sorte de rite vaudou, le « juju ». Un peu de sang, des rognures d’ongles, des cheveux ou poils pubiens sont prélevés sur la fille. Si la prostituée s’échappe ou ne rembourse pas sa dette, la croyance veut que ces prélèvements puissent être utilisés pour rendre une personne malade, folle, ou la faire mourir.

 

« Il est déjà arrivé que l’on retrouve de petits sachets avec ces prélèvements lors de perquisitions au domicile des auteurs de traite, indique Heidi De Pauw, directrice de Pag-Asa. Dans notre maison d’accueil, on voit que les victimes africaines ont toujours leur bible avec elles. Si l’une d’elles tombe malade par hasard, sans que ça n’ait rien à voir avec le vaudou, elle quitte la maison d’accueil et retourne travailler pour payer ses dettes car elle a peur, elle pense que sa maladie est liée au vaudou ». Selon Wim Bontinck, chef de la cellule « traite des êtres humains » de la police fédérale, les professionnels de l’aide aux victimes ont généralement bien de la peine à obtenir des informations des prostituées africaines. « Ces filles sont presque en « possession » de cette dame par le vaudou, elles sont dans un tel état d’esprit qu’il n’est pas toujours nécessaire pour la victime de les menacer : les filles, mêmes exploitées par la « madame », vont tout faire pour lui plaire, car c’est aussi elle qui organise tout pour la prostituée ».  

 

A terme, la victime de ce genre d’exploitation devient souvent une « madame » pour de nouvelles arrivantes, et le cycle recommence. « Une nouvelle travaille environ deux ans non stop pour rembourse sa dette, elle ne peut quasiment rien garder pour elle durant cette période, mais une fois qu’elle a terminé de rembourser, elle est libre, explique Isabelle Jaramillo, coordinatrice d’Espace P (1). A ce moment, soit elle reste dans la prostitution et travaille à son compte, soit elle retourne dans son pays d’origine et applique le même mécanisme pour faire travailler d’autres filles pour elle ».

 

 

(1)     Association d’aide aux prostituées, http://www.espacep.be/

 

 

 

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