D’où viennent les victimes ?
(novembre 2002)
Reportage intégré dans un dossier consacré à la pédopornographie publié dans Le Journal du médecin du 22 novembre 2002 (1)
La pauvreté et la naïveté de beaucoup de familles d’Europe de l’Est en font des proies faciles pour les réalisateurs de pornographie enfantine. Webcams, morphings et caméras digitales sont toutefois répandues partout dans le monde.
Un grand nombre d’enfants montrés nus ou dans des actes à caractère sexuel sur Internet habitent dans les pays d’Europe de l’Est, où la législation n’est pas adaptée à la lutte contre ce genre de criminalité et où les policiers sont peu formés ou équipés. On ne compte plus le nombre de sites hébergés dans cette région abritant les photos et vidéos de ce qu’ils appellent les « Ukrainian angels » ou autre « Russian lolitas ». La plupart de ces sites sont payants, et donc protégés par des mots de passe qui devraient rendre leur consultation impossible au commun des pédophiles, mais ceux-ci s’organisent en petits groupes et finissent pas partager entre eux les codes d’accès ainsi que le contenu de ces sites. Selon Interpol, plus de 120.000 photos à caractère pédophile circulent actuellement sur le réseau Internet, et des centaines de nouvelles autres s’y ajoutent chaque mois.
La pauvreté grandissante qui frappe les Européens de l’Est explique en bonne partie la facilité d’y recruter les victimes. Tandis que des journaux de Kiev publient ouvertement des annonces de « service d’escorte » proposant des filles de 14 ans, des producteurs de pédopornographie proposent des sommes folles à des parents endettés s’ils laissent leurs enfants les accompagner en studio. Et une somme folle dans un pays comme l’Ukraine, où le salaire d’un médecin est de 46 euros par mois (voir JDM du 8/11/2002), c’est une centaine d’euros ! Parfois aussi, les parents sont trompés par les producteurs. « Il n’y a pas si longtemps, la police a découvert un réseau de production de pédopornographie à Nicolaev, une petite ville ukrainienne, explique Oleg, un assistant social d’Odessa.. Il s’agissait d’un studio qui était supposé prendre des photos de futurs modèles pour publicités. Ils demandaient aux parents d’y amener leurs enfants pour quelques essais, et de rester dans une salle attenante au studio pour ne pas déranger les prises de vue. Une fois seuls avec les enfants, ils les pressaient afin qu’ils se déshabillent, d’abord en sous-vêtements, puis entièrement nus, avec de nombreuses photos prises à chaque étape. Elles étaient ensuite publiées sur Internet. Il a fallu des mois avant que quelqu’un s’aperçoive de la supercherie dont enfants et parents étaient victimes ».
Ceci dit, les victimes de pédopornographie ne se trouvent pas que dans les pays pauvres. Les appareils digitaux et les webcams permettent à tout pédophile de publier ses propres abus sur Internet. Des arrestations sont régulièrement opérées pour cette raison dans la plupart des pays occidentaux, dont la Belgique. Problème : vu le nombre gigantesque de photos à caractère pédophile présentes sur le net, il est parfois difficile pour les cyberpoliciers de déterminer si une photo est récente ou pas, malgré la banque de donnée que constitue Interpol. Beaucoup de photos datent des années 70 : elles ont été publiées à l’époque dans des magazines qui circulaient de façon plus ou moins clandestine et des cybernautes les ont récemment scannées afin de les placer sur le net. Les difficultés d’identifier les victimes sont aussi dues au développement du « morphing », une technique qui permet de modifier de façon électronique les corps représentés sur les photos. Plusieurs programmes permettent d’atteindre des degrés remarquables de falsification des photos. Un pédophile s’amusera par exemple à découper électroniquement le contour du corps d’un enfant nu sur une plage, puis à le « copier-coller » pour le placer dans des poses ou dans un décor à caractère sexuel. Le fait ce cet enfant pourra être reconnu ensuite par des proches ne traverse sans doute jamais l’esprit de ces falsificateurs…
Samuel Grumiau
(1) Autres articles de ce dossier :
- http://www.sampress.org/base/frFR/affiche_art/articles-113.html
- http://www.sampress.org/base/frFR/affiche_art/articles-115.html
- http://www.sampress.org/base/frFR/affiche_art/articles-116.html
- http://www.sampress.org/base/frFR/affiche_art/articles-117.html
- http://www.sampress.org/base/frFR/affiche_art/articles-118.html
Quelques liens pour en savoir plus…
Child Focus (Centre Européen pour Enfants Disparus et Sexuellement exploités) :
Police belge : http://www.fedpol.be
Interpol : http://www.interpol.int
Mapi (Mouvement Anti-Pédophilie sur Internet de l'université de Namur, qui étudie la présence sur Internet d'informations incitant à l'exploitation sexuelle des enfants) http://www.info.fundp.ac.be/~mapi/mapi-fr.html
Ecpat : www.ecpat.net
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